Colruyt et le café du Kivu : une initiative « comme il faut »

Colruyt et le café du Kivu : une initiative « comme il faut »

Le premier container de café "nouvelle formule" en provenance du Kivu est arrivé le 12 octobre au zoning de Ghislenghien dans les immenses installations Golruyt. Transporté en sacs de jute remplis de grains verts, ce café est torréfié sur place avant d’être distribué en Belgique.


Colruyt en a même organisé une conférence de presse. Au delà de cette initiative commerciale, de part la méthode, l’affaire présente vraiment des aspects intéressants, ne fut-ce que par les intentions, la traçabilité et l’histoire de ce produit.  


L’"éthiquette" Colruyt


On l’hume dès qu’on se promène à l’air libre. Colruyt ne sous-traite pas la torréfaction du café, elle est faite dans le zoning de Ghislenghien sous les yeux de Kris, le maître torréfacteur. «C’est d’ailleurs la seule chaîne de supermarchés en Belgique qui procède encore de cette manière » nous fait remarquer fièrement Philippe Toussaint, project manager « Achats durables » de Colruyt Group. L’entreprise ne suit pas les filières traditionnelles puisqu’en plus, elle achète directement son café aux producteurs, sans passer par des intermédiaires, une forme de circuit-court à l’industrielle. En outre, la firme, assez puissante que pour ne pas s’embarrasser de contraintes, « by pass » le label Fairtrade et fait elle-même de l’équitable. Elle va d’ailleurs lancer, via son fonds éducatif « Collibri foundation » géré par la fondation Roi Baudouin, un projet de formation des jeunes dans la région. 


Bon Kawa, bon Kharma !


Concrètement, le café Kivu, produit dans la gamme fine Graindor, est cultivé par une coopérative de 2200 petits producteurs congolais. C’est de l’arabica, idéal pour la culture en hauts Plateaux du Kivu. Région frontalière (avec le Rwanda et le Burundi), le Kivu est en proie à de nombreuses difficultés. Les coopérateurs sont disséminés sur les hauteurs occidentales du Lac Edouard et rassemblés autour de 45 micro-stations de lavage. Le dispositif est mis en place par l’ONG Rikolto (récolte en esperanto). Et c’est là que Colruyt intervient. 


La marque belge, qui veut rentrer « dans un cercle vertueux de renforcement économique », s’est associée avec l’ONG compatriote Vredeseilanden (nouveau nom : Rikolto) pour soutenir la coopérative Kawa Kabuya. En résumé, les 2.200 caféiculteurs lui vendent 28 tonnes et demi par an (20% de sa production), le prix d’achat d’une livre de grains verts est majoré de 50 cents de dollars par rapport au prix du marché. Philippe Toussaint: "D’abord, nos prix sont respectueux. Mais il y a plus. D’habitude, les coopératives du Sud payent leurs petits producteurs au moment où ils livrent leurs récoltes, c’est à dire quelques mois avant la commercialisation du café. Comme elle n’a pas de liquidités, elle est obligée de recourir à un crédit-pont pour financer l’opération. Afin qu’ils ne recourent pas au crédit, trop cher, nous réglons donc 60% du montant de notre achat avant la récolte, au moment de la commande." Hanne Poppe, chargée des relations, nous précise "Nous nous lançons cette année et nous procédons de la même manière en pré-finançant le quinoa avec les producteurs du Pérou."


L’arabica est considéré comme doux et fruité. Cette méthode aussi. On verra bien sûr comment l’opération mûrit. Philippe Toussaint précise : "Elle est prévue pour trois ans et à ce moment-là, la coopérative qui se sera construite une légitimité pourra facilement s’intégrer dans le micro-crédit en cas de coup dur."


D.R.