Comines : la Région donne son feu vert pour le centre de recyclage du Speedway de Warneton, la ville va saisir le Conseil d’État

Le conseil communal de la ville s’est unanimement prononcé en faveur d’un recours. Majorité et opposition ne veulent pas que ce projet rejeté à plusieurs reprises en Flandre s’installe de leur côté de la frontière linguistique.
C'est un dossier qui n'en finit pas de rebondir à Warneton. Près de deux ans après un premier refus communal confirmé par la Région, le projet de centre de recyclage porté par la société flamande Deryckere-D'Hondt vient de recevoir l'aval du ministre wallon de l'Aménagement du territoire, François Desquennes. Une décision qui relance la controverse autour de l'ancien Speedway et pousse la Ville de Comines-Warneton à préparer un recours devant le Conseil d'État.
L'entreprise, spécialisée dans le terrassement et la revalorisation de matériaux, souhaite transformer le site de 3,3 hectares autrefois dédié aux loisirs motorisés en un vaste centre de tri et de concassage. Le projet comprend un hall de près de 7 000 m², des bureaux, une conciergerie et des zones de stockage destinées aux déchets inertes. Une première demande, introduite en 2023, avait été rejetée par le Collège communal, décision ensuite confirmée par un arrêt ministériel en 2024. Mais la société n'a pas renoncé et a reformulé sa demande en tenant compte, dit-elle, des remarques émises lors de l'enquête publique précédente.
"Comines ne doit pas devenir la déchetterie de la Flandre"
Autour de la table du conseil communal, la sidération s'est vite transformée en colère. Le feu vert du ministre wallon de l'Aménagement du territoire, François Desquennes, pour le centre de recyclage du Speedway de Warneton est perçu comme une injustice territoriale.
Pour les élus, la commune paie les erreurs d'ailleurs. "C'est une catastrophe pour notre ville, pour ce quartier calme où régnait encore une vraie quiétude", déplore Louis Vandamme (Les Engagés), qui déplore cette décision d'un membre de son parti.
À ses yeux, le signal envoyé est dangereux : "On ouvre la boîte de Pandore. Les entreprises recalées en Flandre vont venir s'installer ici. Comines ne doit pas devenir la déchetterie de la Flandre."
Des propos partagés jusque dans la majorité. Didier Soete (Ensemble - Ecolo - MCI) déplore, lui aussi, cette décision : "C'est l'ouverture à tout ce que la Flandre ne veut plus. Notre petite zone de Comines-Warneton devient le réceptacle d'un bashing économique. On embête nos agriculteurs avec des réglementations complexes, mais on ferme les yeux pour des projets qui rapportent un peu de taxes".
Une décision "économiquement absurde" et juridiquement contestable
Si tous les conseillers s'accordent à dire qu'il faut bloquer ce dossier au maximum, la bataille s'annonce compliquée. Le recours au Conseil d'État sera introduit, mais certains doutent déjà de ses chances.
Pour Philippe Mouton, échevin de l'Environnement, le ministre a mal interprété la réalité du terrain :
"Il évoque la conformité du projet au plan de secteur, mais il oublie que cette zone n'a plus rien d'industriel depuis plus d'un demi-siècle. Le chemin de fer a disparu, les extractions ont cessé." L'élu espère s'appuyer sur une erreur d'appréciation pour renverser la décision.
Alice Leeuwerck, la bourgmestre, partage cette lecture. Pour elle, le coeur du problème est simple : "Ce projet n'a rien à faire là." Elle dénonce un permis d'exploitation de vingt ans octroyé "sans tenir compte du contexte local", dans un quartier calme où les camions ne passeront pas inaperçus.
Un quartier menacé dans sa quiétude
Au-delà des arguments politiques ou juridiques, les élus décrivent une inquiétude très concrète : celle des riverains. Le conseiller Éric Devos évoque un cadre de vie menacé : "C'est un quartier où il fait bon vivre, avec de jeunes ménages et des enfants. Les vents dominants pousseront les poussières vers le centre de Warneton. Et on parle tout de même d'amiante." Un hébergement canin situé à proximité du site pourrait, selon lui, être le premier touché : "On va littéralement massacrer une petite entreprise."
Entre résignation et colère, le conseil communal s'est exprimé à l'unanimité pour se lancer dans un recours. "Il faut se battre, même si nos chances sont minces", a résumé Didier Soete.
Théo Defranne