Fact-checking : les fausses affirmations avancées par la majorité MR-Engagés pour définancer les médias de proximité

Fact-checking : les fausses affirmations avancées par la majorité MR-Engagés pour définancer les médias de proximité

Fact-checking : les fausses affirmations avancées par la majorité MR-Engagés pour définancer les médias de proximité

Plusieurs imprécisions et erreurs factuelles sur les médias de proximité ont été énoncées par la majorité MR-Engagés notamment lors d’une session du parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles et lors d’une commission des Médias.

Le 16 septembre 2025, une commission des Sports, de la Fonction publique et de la Simplification administrative, des Médias et de la tutelle sur Wallonie-Bruxelles Enseignement s'est tenue. Plusieurs questions d'actualité ont été adressées à la ministre des Médias Jacqueline Galant (MR) sur la réforme des médias de proximité. Le lendemain, le 17 septembre, le sujet a également été abordé en séance plénière du parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Durant ces échanges mais également durant les mois qui les ont précédés, les instances du MR, la ministre des Médias Jacqueline Galant, les députés de la Fédération Wallonie-Bruxelles Olivier Maroy (MR) et Armelle Gysen (Les Engagés) ont avancé des arguments pour la réforme qui ne correspondent pas à la réalité des médias de proximité.

"Plus de la moitié des médias de proximité sont en faillite virtuelle."

FAUX

Cette phrase, prononcée par le député Olivier Maroy, a été utilisée comme argument pour justifier la nécessité d'une réforme des médias de proximité. L'argument a été repris par Armelle Gysen qui a mentionné, elle, un "déficit structurel".

Cette affirmation est fausse. Aucun média de proximité n'est en faillite virtuelle ou réelle. Tous leurs comptes sont disponibles et consultables via le site de la Banque nationale. Seuls des investissements et des amortissements affectent les résultats 2024 de deux médias sur 12, Boukè et Télésambre.

"Ne rien faire pour ne pas déplaire à quelques baronnies locales, c'est, à terme, voir disparaître une grande partie d'entre eux."

FAUX

Le député MR Olivier Maroy sous-entend dans cette affirmation que les médias de proximité sont à la solde de quelques élus locaux. C'est faux. La chambre publique des conseils d'administration des télévisions locales est conforme aux forces politiques en présence sur la zone et distribuée en respect de la clé D'Hondt. La chambre privée regroupe les forces vives de la région (chambres de commerce, associations, centres culturels, ).

Au contraire, la réforme des médias de proximité prévoit la politisation des conseils d'administration "en permettant par exemple la présence de bourgmestres et d'échevins."

Composé de 40 personnes, le conseil d'administration de notélé a pour objectif de représenter au mieux les différentes facettes de la Wallonie picarde.

D'un côté, le secteur public compte 19 représentants. Ces administrateurs sont proposés par les différents groupes politiques. La répartition découle des résultats du dernier scrutin communal en Wallonie picarde (MR 6 administrateurs, PS 5, Les Engagés 4, Ecolo 1, Liste citoyenne 1). On y retrouve aussi deux représentants des intercommunales IEG et IDETA.

Du côté du secteur privé, on dénombre 21 administrateurs. Ils représentent les mondes associatif, culturel et économique.

"Il existe actuellement onze médias de proximité en Wallonie, avec onze conseils d'administration et autant de services destinés aux ressources humaines, à la comptabilité ou à ce qui relève du juridique."

FAUX

Le 16 septembre, lors de la commission Médias, la députée Armelle Gysen (Les Engagés) a déploré la présence de services ressources humaines, comptabilité et juridique dans chaque médias de proximité en Wallonie. Elle souhaitait mettre en avant l'inefficience du modèle actuel. Cette affirmation est fausse.

De tels services, au sens d'un organe d'une entreprise chargé d'une fonction précise et occupé par plusieurs personnes, n'existent pas dans les médias de proximité. À notélé, par exemple, la comptabilité, les ressources humaines et certains aspects juridiques sont gérés par une seule personne.

De plus, certains moyens administratifs, particulièrement sur les aspects juridiques, sont d'ores et déjà mutualisés via le réseau des médias de proximité.

"Les caisses (de la Fédération Wallonie-Bruxelles) sont vides"

S'il est vrai que la Fédération Wallonie-Bruxelles affiche un déficit de 1,5 milliard d'euros, l'utilisation de cette affirmation par la ministre en charge des médias, Jacqueline Galant, dans le cadre de la réforme des médias de proximité est trompeuse. Lors d'une conférence donnée en avril 2025, Jacqueline Galant indique encore que "tout le monde doit faire des économies, également les médias de proximité." A ce jour, aucun élément et aucun chiffrage ne permettent d'avancer que les propositions de la majorité MR-Engagés concernant les médias de proximité permettront de faire des économies.

De plus, dans un rapport sur les différentes pistes en vue d'assainir les finances publiques, les experts sollicités par le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles préconisent des économies à la RTBF plutôt que dans les médias de proximité. Selon eux, il faut relativiser la portée des "efforts de rationalisation" des médias de proximité entrepris par le gouvernement MR-Engagés et s'assurer "que ces efforts n'affectent pas la qualité du service offert en matière d'informations de proximité." En outre, "le budget annuel de l'ensemble des médias de proximité équivaut à 3,5% du budget alloué à la RTBF", précisent encore les experts.

S'il faut grappiller des moyens dans l'audiovisuel, le comité d'expert invite à les chercher plutôt du côté de la RTBF, dont la dotation (376 millions en 2025) représente 84,7% du budget audiovisuel et multimédia de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

L'Inspection des Finances (IF) a, de son côté, émis des remarques le 16 juillet dernier concernant la note du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles sur la réforme des médias de proximité. L'IF estime notamment "qu'aucune analyse des risques, notamment juridiques, inhérents à la proposition n'a été jointe" ou encore se demande si "la centralisation par province est bien compatible avec les objectifs de politique publique que vise la Communauté française en subventionnant des médias de proximité."

Finalement, la Fédération Européenne des Journalistes (FEJ), sur base du dernier rapport européen sur le pluralisme des médias, déplore "l'absence de critères économiques objectifs déterminant l'enveloppe des subventions publiques allouées aux médias publics. Le rapport appelle les autorités publiques belges à établir des critères objectifs prédéfinis en vue d'une allocation équitable des budgets dont disposent les médias publics. La réforme envisagée ne propose aucune amélioration en ce sens. Au contraire même, puisque la diminution proposée des subventions de fonctionnement apparaît comme purement linéaire et arbitraire."

"Les audiences plongent"

FAUX

Cette phrase, prononcée par la députée Armelle Gysen et renforcée par l'affirmation d'Olivier Maroy selon laquelle "les grandes plateformes cannibalisent les audiences", ne correspond pas à la réalité chiffrée et factuelle pour la majorité des médias de proximité.

Selon une enquête d'audience réalisée en 2023, plus de 600.000 personnes regardent les médias de proximité chaque jour. Au terme de 7 jours accumulés, près d'une personne sur deux regarde notélé en Wallonie picarde. Toujours selon la même enquête, le nombre de spectateurs réguliers au moins 5 jours sur 7 est en constante augmentation depuis 2019.

Outre la télévision linéaire, le site notele.be a enregistré 701.000 pages vues en août 2025. Lors des élections communales de 2024, ce sont près d'1,2 million de pages qui ont été consultées en un mois. Depuis 2015, le nombre d'utilisateurs, de sessions et de pages vues sur notele.be est en augmentation constante.

Sur les réseaux sociaux, notélé cumule près de 180.000 followers, soit plus de la moitié de la population totale de son territoire, la Wallonie picarde, qui compte 357.000 habitants. Au quotidien et lors des événements folkloriques importants de la région, les publications de notélé atteignent des millions de personnes. Par exemple, les vidéos et reels publiés par notélé lors de la ducasse d'Ath 2025 ont généré plus de 2,5 millions de vues sur Facebook, Instagram et TikTok.

Finalement, 7 belges sur 10 se disent particulièrement intéressés par l'information locale selon une étude du CRISP de février 2024. Il est donc réaliste de concevoir que les perspectives d'avenir pour les médias de proximité sont réelles.

"Un modèle à bout de souffle"

FAUX

Dans un communiqué datant du 2 juin 2025, le MR affirme que le modèle des médias de proximité est à bout de souffle. Une analyse basée sur des éléments chiffrés d'audience (voir point précédent), de diversité de contenus et d'agilité en matière de production remettent sérieusement en doute cette affirmation.

Les médias de proximité ont depuis longtemps opéré le virage du numérique tant de par leur présence sur les réseaux sociaux que par la création de sites internets modernes et même, pour certains, d'applications mobiles.

Les contenus mais aussi les méthodes de production évoluent continuellement. Dans le cas de notélé, le média de proximité de Wallonie picarde s'est notamment doté en 2022 d'un car de captation UHD-5 permettant la retransmission en 4K d'événements sportifs, folkloriques ou culturelles. Un outil disponible pour des co-productions au sein du réseau des médias de proximité mais également en location pour des grands acteurs du secteur audiovisuel.

Finalement, notélé ainsi que d'autres médias de proximité ont largement adopté l'utilisation de kits JRI (journaliste reporter d'images) afin de garantir une meilleure agilité des équipes et de répondre aux défis du secteur. Les médias de proximité produisent en continu avec des coûts de production qui sont, pour une séquence d'information en Belgique, 10 à 17 fois inférieurs à ceux d'une chaîne nationale.

"La réforme vise à sauver les médias de proximité en réorganisant l'offre, sans perte de couverture pour les citoyens de la Fédération Wallonie-Bruxelles"

FAUX

Lors de la commission des Médias de la Fédération Wallonie-Bruxelles, le député MR Olivier Maroy affirme que la réforme des médias de proximité n'impactera pas la couverture médiatique des régions concernées ni le pluralisme des médias. La Fédération Européenne des Journalistes (FEJ) n'est pas de cet avis et l'a fait savoir dans ce rapport du 19 septembre 2025.

Selon le dernier rapport européen sur le pluralisme des médias, l'état du pluralisme des médias en Belgique est désastreux. Elle se classe parmi les pays qui affichent le plus fort degré de concentration des médias. Un autre rapport pointe du doigt la présence de "déserts informationnels" dans certaines régions de Wallonie ainsi qu'une concentration accrue de la presse écrite avec l'absorption des quotidiens du groupe IPM par le groupe Rossel.

Sur base de tous ces éléments scientifiques, la FEJ conclut : "L'annonce de la suppression, d'ici à 2031, de 4 des 11 chaînes wallonnes de proximité, et la fin de l'indexation du budget de fonctionnement de ces médias publics de proximité, dès 2026, ne peut qu'aggraver la situation. Ces mesures sont en contradiction totale avec les recommandations aux autorités publiques du rapport belge MPM2025, qui appelle au contraire à augmenter le soutien financier public aux médias locaux (page 24 du rapport)."

Des propositions concrètes pour l'avenir des médias de proximité

Loin de fermer la porte aux discussions, les médias de proximité se disent prêts à co-construire une réforme pour 2031. Dans le Hainaut, notamment : "les quatre médias hennuyers souhaitent s'inscrire dans une réflexion volontariste et pragmatique pour renforcer l'information de proximité de service public dans un paysage francophone médiatique en transition", précisent TéléSambre, Télé MB, Antenne Centre et notélé.

Voici les propositions concrètes adressées à la ministre des Médias Jacqueline Galant en juin 2025 :


B.D.